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Gaya sur sa lune
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2 mars 2009

L'âme du diable : 9 décembre - II

Partie II

Après un long moment d’observation, elle découvrit un petit trou dans le mur. Elle enleva un rayon d’un peu plus de deux centimètres autour de celui-ci et sortit une petite caméra. Que pouvait-elle bien observer ? Était-il possible que quelqu’un, faisant la surveillance l’ait vue ? Mais dans ce cas, comment se fait-il que tous se soient laissés attraper aussi facilement ? Était-ce un piège ? Elle prit son revolver et sortit en tâchant de faire le moins de bruit possible.

Elle découvrit après un certain temps la salle de contrôle, mais aucun écran ne donnait sur la caméra du bureau.

Elle continua sa recherche. Elle se retrouva bientôt dans la chambre de Cioran. Commençant à être énervée, elle jeta à terre tous les livres de la bibliothèque en espérant que peut être un indice ou des cassettes se cacheraient derrière. Tout cela se révéla infructueux. De plus en plus agacée et frustrée, elle jeta à bas toutes les étagères. Cela la calma partiellement. Elle vit alors que là où se trouvait auparavant une des étagères, se dessinait désormais une porte. La poignée était un anneau de fer. Ayant dégagé l’armoire à terre qui gênait encore pour l’ouverture, elle força la porte qui s’ouvrit toute seule. Pointant son revolver devant elle, elle appuya sur l’interrupteur découvert à l’aveuglette sur le mur et la lumière s’alluma.

Elle découvrit alors enfin ce qu’elle cherchait. Il y avait sur une table un petit écran. Elle l’éclaira et retrouva un morceau du bureau. Elle regretta de ne pas avoir laissé la caméra en place. Elle aurait ainsi pu savoir ce que Cioran surveillait.

Sur l’écran, elle vit la porte s’ouvrir. Eric Etienne entra suivi de plusieurs autres policiers du commissariat et Lélia. La caméra lui montrait le dessus des têtes lorsqu’ils passaient la portes.

Aline prit la cassette et décida qu’il était grand temps de partir. Elle ne chercha pas la porte mais sauta après inspection des environs par la fenêtre. Elle traversa le plus rapidement possible le parc, grimpa à nouveau sur le mur pour ressortir. Au moment où elle sauta un policier la vit et lui dit de s’arrêter. Il lui courut après mais elle rejoignit sa moto. Comme il n’avait pas les même réflexes qu’elle, le temps de dégainer son arme, elle avait déjà disparu.

Aline, de retour chez elle, visionna en accéléré la cassette qui contenait un peu plus de huit heures de film. Elle découvrit que dans le bureau de Cioran se trouvait une trappe dans un des coins de la pièce. Celle ci ne se voyait pas même avec un œil exercé car elle n’était pas carrée mais respectait les mesures des planches de bois et Cioran l’ouvrait avec un très fin levier de métal qui semblait être autrement une simple plaque décorative du bureau.

En sortant la cassette de son magnétoscope, Aline entendit que l’on forçait sa porte d’entrée. Elle remit l’objet dans son sac et sortit par derrière. Elle se cacha dans un bosquet. Au même moment, deux policiers apparurent et passèrent par la porte qu’elle venait d’emprunter. Déclarant la voie libre, elle sortit par le jardin et sauta le grillage.

Maintenant que sa maison allait être surveillée, ses véhicules gardés, où allait-elle pouvoir aller. Il fallait aussi donner cette cassette. Pourquoi ne pas la mettre dans la boite aux lettres d’Eric ? Elle penserait à l’avenir plus tard. Elle se sentait si perdue et seule. Pour la première fois, elle regretta que son père ou n'importe quelle autre épaule, ne soit pas là. Elle aurait aimé que quelqu’un la prenne dans ses bras et lui dise quoi faire, où aller. Elle aurait aimé se confier à quelqu’un.

Le soir arrivait quand elle parvint à l’immeuble de l’inspecteur. Elle entra.

Eric fut de retour du boulot vers les dix heures. Il était resté chez Lélia pour essayer de trouver avec elle des endroits où Aline avait pu aller. Ils s’étaient alors aperçus combien ils ignoraient tout de la vie de leur collègue. C’était alors fourbu et furieux qu’il rentra.

Un peu inquiet peut être aussi, pour celle qu’il, malgré ce qu’elle avait fait, aimait.

Il glissa la clef dans la serrure mais ne put tourner.

-« Merde, j’ai encore oublié de fermer ! »

Il poussa la porte et éclaira la lumière. Elle était là, assise au fond d’une chaise, son pistolet posé sur la table à coté. Elle ne disait rien. Elle mit du temps à se rendre compte qu’il était là. Il sortit son arme de service.

-« Ce n’est pas la peine, je ne suis là que pour parler.

-Pourquoi ne pas aller au commissariat ?

-Je… Je crois que j’ai peur. Les autres… Lélia… Non, restons là je t’en supplie. »

Eric s’approcha d’elle et elle se ratatina dans sa chaise. Il prit le revolver sur la table.

-« Je t’écoute. »

Il y eut un grand silence. Aline ne savait pas par où commencer.

-« Pose-moi des questions, je te dirais la vérité.

-Qui est l’homme qu’on a retrouvé dans ta maison ? »

Aline fut surprise, puis se souvint :

-« Oui, c’est Lestat. Son prénom est Arnaud.

-Lestat ? Il travaillait avec deux personnes sur une affaire. Tu en as entendu parler ?

-Oui. Je suis l’une de ces personnes. L’autre est l’homme que j’ai tué ce matin. On devait…

-Quoi ? »

Aline ne pouvait se résoudre à répondre.

-« QU’ELLE ETAIT VOTRE MISSION ?

-On devait te surveiller, et après… te tuer. »

Aline détourna la tête pour pleurer. C’était la première fois qu’elle pleurait depuis toutes ces années, depuis cette fois où elle avait été enfermée 3 jours durant pour s'être laissée aller aux larmes... Elle ne se rappelait même plus la cause de son chagrin ce jour là, seulement la punition. Elle trouvait que ça faisait mal aux yeux, mais que ça faisait du bien à son corps et à son esprit.

Elle se sentait si faible, en colère contre elle même... comment pouvait elle se laisser aller ainsi, pourquoi même se laissait elle aller ainsi, pourquoi ne pouvait elle pas tout simplement liquider le problème, comme elle l'avait toujours fait ?

Eric détourna la tête. La révélation lui avait causé une grande stupéfaction, mais, ne pensant pas tout de suite à tout ce que cela impliquait, il continua son interrogatoire.

-« Ce matin, c’était vous, n’est ce pas, chez Cioran.

-Chez… Oui. J’y suis allé afin de savoir s’il avait engagé d’autres chasseurs.

-Chasseurs ?

-Des tueurs… si tu préfères. D’ailleurs, j’ai récupéré la cassette ! »

Elle porta la main à son sac. Eric pointa sur elle les deux revolvers.

-« Je sors l’enregistrement, je n’ai pas d’armes ! »

Elle lui tendit l’objet.

-« Il y a toute la conversation que j’ai eu avec lui. Je l’ai aussi enregistrée sur une autre, comme j’ignorais l’existence de sa caméra. »

Elle tendit une petite cassette.

-« Pourquoi tu fais ça ?

-Quoi ?

-Pourquoi tu me donnes ces preuves sachant qu’elles t’accusent aussi !

-… Mais je suis coupable aussi ! Durant toute ma vie j’ai tué des tas de gens. Je ne me souviens même pas de leurs noms, pour moi c’était si simple ! La mort pour moi ne voulait rien dire, elle n’était qu’un partenaire de jeu. C’était quelque chose de si insignifiant ! Peut être parce que je ne tenais à personne assez fort pour que l’idée de le perdre me fasse peur. Mais quoi qu’il en soit, je dois payer, je le dois à ces personnes à qui j’ai pris leur famille. Jamais je ne pourrais être pardonnée, mais je sais que si moi, on… j’aurais voulu que les coupables soient punis. »

Aline avait bien failli dire que si on avait tué Eric, elle aurait voulu que les coupables payent. Elle s’était reprise à temps. Elle l’aimait, pour elle ça ne faisait plus aucun doute, mais maintenant elle craignait ses réactions, et le seul fait qu’il soit possible qu’il ne la croie pas l’attristait énormément.

-« Et, quels sont tes projets maintenant ?

-Je ne sais pas… Je me sens si perdue… Il faut que je réfléchisse. Je n’étais pas prête à une telle situation. Je ne sais plus ce que je dois faire… J’ai besoin de temps, tu comprends. Il faut que je fasse le point sur moi et que je me retrouve.

-Ces choses là, tu auras tout le temps de les faire en prison ! »

Une grande panique traversa Aline. Elle se leva brusquement et se plaqua dans le coin le plus proche d’elle de l’appartement. Elle ne savait même plus comment réagir, comme si son self contrôle avait volé en éclat pendant la journée et qu'elle ignorait comment le retrouver.

-« Pas la prison, je ne peux pas, c’est… c’est trop dur, pas encore… Je ne survivrais pas… Tu comprends, c’est impossible, ne m’oblige pas à y aller, je ne peux pas y aller maintenant. Les mauvaises gens sont trop nombreux là-bas, je ne pourrais pas les combattre. La prison c’est l’enfer et du gâchis. »

La prison, Aline en avait trop souvent entendu parler... Elle savait bien sûr aujourd'hui que les prisonniers n'étaient point torturés comme le prétendait son père, et qu'ils avaient une vie relativement salubre, mais des années vouées à lui inculquer la peur de la prison ne disparaissaient pas aussi vite!

Eric tenta de la calmer, mais Aline l’assomma d’un violent coup de coude inconsidéré. Elle s’agenouilla devant le corps inerte du jeune homme et pleura. Elle aurait souhaité pleurer jusqu'à la fin de sa vie, cela aurait été si simple, maintenant qu’elle savait le faire, mais elle devait faire face à la situation. Elle devait réagir pour ne pas devenir folle. Parce que c'était ce qu'elle était en train de devenir, folle... Et voir Eric ainsi à terre la faisait presque trembler.

Elle prit le pouls de l’inspecteur et poussa un soupir de soulagement en voyant qu’il était toujours en vie.

Elle prit feuilles et un crayon et commença à écrire un message pour Lélia, car elle n’aurait probablement pas l’occasion de la voir et un besoin de justifier l’injustifiable l’avait pris.

Lélia,

Je ne sais pas si tu liras ces lignes et je comprendrais très bien que tu ne le fasses pas. Je ne sais ce que je ferais à ta place, car je ne sais même plus ce qu’il faut que je fasse à la mienne. Je ne te demanderais rien, sinon de veiller sur Eric, car peut être aura t - il besoin de toi. Tu n’avais que trop raison lorsque tu disais que soit je tuerais cet homme, soit je l’aimerais. Tous les deux avez été ce que j’ai eu probablement de meilleur, et si je croyais en Dieu, je l’en aurais bien remercié, même si aujourd’hui la vision du monde que j’ai grâce vous ne me donne que des souffrances par rapport à la bêtise à laquelle j’appartenais toute entière auparavant. J’aurais aimé que rien ne soit arrivé et que nous soyons toujours amies, mais dans ce monde, il n’est pas de place aux regrets. Je ne demanderai même pas ton pardon, il serait immérité.

Loin de moi est la pensée de t’amadouer, mais la vérité est telle que tu as été la seule amie que j’ai jamais eu. Je te remercie de ce sentiment que tu as fait naître en moi. Je suis terriblement désolée d’avoir trahi ta confiance. Je ne te dirais pas qu’il était difficile pour moi de te mentir, car là encore ce serait un mensonge. Je me suis jouée de toi comme de tant d’autres personnes. J’en ai honte maintenant. Au fond je le découvre maintenant, je crois que j’ai toujours eu de l’estime pour toi. Peut être même ai-je désiré un jour te ressembler. Tu étais ce que je n’étais pas, tout ce que je ne comprenais pas et que je souhaitais mépriser. Alors j’ose ici m'excuser pour tout ce que je t'ai fait, lorsque je t'ai menti et utilisée, même si c’est peut être un peu déplacé, je le conçois.

Adieu, je pense, car tu ne voudras certainement plus me voir.

Aline Holkes

Elle en écrivit une autre à Eric, plus simple et plus courte, car elle ressentait une grande gêne à son égard.

- « Et ces lettres, où sont elles? Laissez moi deviner, la police ne les a jamais reçues c'est ça? »

Je me fis une petite note mentale de retrouver les deux intéressés pour vérifier la véracité de cette histoire. Même si à la rigueur, si je débarque chez l'un des deux en demandant s'ils ont reçus des excuses de la grande tueuse qu'ils ont poursuivis, ils vont me prendre pour un fou... L'idée m'en ferait presque sourire.

Je quitte Mme A qui me regarde toujours avec son air indulgent tout en pensant à plusieurs moyens de soutirer des informations aux intéressés et à comment les contacter.

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