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Gaya sur sa lune
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6 novembre 2008

L'âme du diable : 4 décembre - II

 

Partie II

Tout en conduisant, celle ci regardait assez souvent dans son rétroviseur. Elle avait repéré une voiture gris métallisé qui la suivait depuis qu’elle était partie avec son collègue. A coup sûr, c’était un autre tueur engagé pour surveiller sa proie. Aline n’aimait pas la concurrence et l’aurait bien supprimée, mais elle ne le pouvait pas. BZ ne serait pas content qu’elle lui ait tué un homme. Elle n’aurait pas sa paie et il la trouverait par surplus capricieuse. Elle n’avait qu’une seule alternative, l’intimider, mais elle devait tout d’abord connaître son identité.

Ils arrivèrent assez vite dans un embouteillage, qui était chose fréquente dans la plus grande ville de France. Aline montra à son coéquipier l’avantage de la moto dans des situations comme celle ci. Ils arrivèrent tout juste à l’heure, mais Lélia mise à part, personne n’y prit garde.

-« Je suis déçue, je t’attendais pour au moins vingt minutes à l’avance, mais tu recommences déjà à retrouver tes mauvaises habitudes…

-Ne lui en voulez, c’est de ma faute, c’est moi qui n’étais pas prêt. »

Lélia lui sourit :

-« Mais je ne lui en voulais pas ! Je commence à être habituée à ses retards répétitifs. Je disais cela seulement pour l’énerver, sans quoi elle ne fait pas du bon boulot. Vous savez, elle était arrivée en avance hier, la première fois que ça lui arrivait ! J’ai l’impression que vous lui êtes très bénéfique. Vous verrez, elle a parfois un sale caractère, mais on arrive rapidement à se prendre d’affection pour elle. C’est quelqu’un de bien. Je vois qu’elle commence à s’énerver alors je vous la laisse. Bonne journée. »

Lélia s’en alla, non sans donner un dernier regard plein de malice à son amie, qui, loin d’être énervée s’amusait de la grosse erreur de la jeune fille. Avec elle, aucun doute, sa couverture ne serait jamais dévoilée. Elle la suivit du regard, plongée dans ses pensées.

Cette journée se déroula sans incidents. La plupart des endroits où elle passa avec son coéquipier lui était déjà connus car elle y avait eu quelques rendez-vous avec son patron, mais elle n’eut aucun renseignement sur les avancements de ses recherches. Il ne devait pas encore avoir assez confiance en elle, ce en quoi il n’avait pas tort, mais elle se promettait d’y remédier rapidement. Le jeu de la séduction avait déjà commencé. Elle prévoyait déjà qu’il serait long et difficile, car tous deux étaient très différents, mais elle était certaine de l’issue. Il n’y avait aucune raison que ce moucheron ci ne tombe pas dans sa toile. Elle construisait celle ci lentement, mais sûrement. Elle le laissait voler au travers, pour lui inspirer confiance, mais ce n’était qu’un sursis. Il n’était pas le premier et il ne serait probablement pas le dernier.

-« Je crois que j’en ai fini pour aujourd’hui. Je n’ai pas appris grand chose. Allez, on rentre. »

Il semblait las en cette fin d’après midi, mais elle était bien décidée à en remettre une dose. Pour voyager dans la ville, elle avait dû plier et prendre une voiture, mais il n’en était plus question pour rentrer. Quand ils arrivèrent au commissariat, elle ne lui laissa pas le temps de demander la raison de ce retour à l’opposé de son appartement.

-« Les casques sont sur mon bureau ! »

Il compris alors où elle voulait en venir, mais il n’eut pas le temps de protester, car elle était déjà allée chercher le véhicule. Il prit le parti de faire ce qu’elle lui avait dit et revint. Il entendit bientôt le bruit de moteur qu’il redoutait.

-« Il n’est pas question que je remonte là dessus. Ne pouvons nous pas récupérer quelque voiture de service ?

-Non, je n’ai plus le droit de faire ça. Le commissaire n’était pas du tout content la dernière fois.

-Alors rentrez chez vous, je prendrais un taxi. En plus, je suis sûr que je vous fais faire un détour. Je peux me débrouiller seul. Ne vous inquiétez pas pour moi. Nous nous retrouverons demain.

-Non, je tiens à vous raccompagner. Les taxis sont trop lents, vous mettrez bien moins de temps avec moi. Arrêtez vos chichis et montez derrière moi. Tant qu’a votre appartement, il est presque sur le chemin de ma maison. »

Le pauvre M. Etienne ne savait plus que faire et que dire pour éviter de monter sur l’horrible engin.

-« Vous savez, la moto ne me dit rien… Je ne suis pas un grand fan de ces véhicules… Avec elles, un accident est…

-Vous n’avez pas confiance en moi ou vous êtes un peureux de nature ? Ou bien peut être les deux… Vous m’en voyez apitoyée pour vous. Je suis bien déçue surtout du peu de crédit que vous me témoignez. J’essayerais dès demain de vous trouver un autre équipier et guide. Je pensais que vous étiez un homme plus sérieux que cela. »

Elle fit mine de partir en mettant son casque sur la tête, ayant prit bien soin de lui laisser le deuxième entre les mains. Le sang du jeune homme ne fit qu’un tour. Il s’avança vers la jeune femme.

-« Attendez !

-Oui ? »

Il ne savait pas quoi lui dire. Il trouvait que son sermon était injustifié et qu’elle se trompait lourdement à son sujet, mais il ne savait comment l’aborder. Il imaginait assez bien son visage courroucé sous le casque noir et cela l’embêtait assez. Jamais on ne lui avait parlé ainsi. Il n’aimait pas les motos, était-ce un drame ? Il s’aperçut soudain du casque qu’il avait entre les mains.

-« Vous alliez l’oublier…

-Merci ! »

Elle lui prit aussi sèchement l’objet qu’elle avait prononcé ces dernières paroles. Etienne fut grandement peiné de cette réaction, sans qu’il ne sache pourquoi. Jamais il n’avait prit garde aux remontrances ni aux fausses accusations, mais là, sans aucune raison, il en était affecté. Sûrement parce qu’elle savait qui il était et qu’il commençait à l’apprécier.

-« Vous savez, je ne suis pas un lâche, mais je n’aime pas ces engins là. Ce n’est pas que je n’ai pas confiance en vous, au contraire, mais c’est que je n’ai aucun crédit en votre moto. Veuillez me croire, dans tout autre véhicule, je serais volontiers monté, mais celui là est traître. Il vous fait croire à la liberté et vous apporte la mort. Réconcilions nous et ne mettons pas une histoire de deux roues dans notre amitié…

-En ce cas, si c’est à mon ‘’engin’’ que vous ne faites pas confiance, il est temps pour vous de changer d’avis à son sujet. Je gage que jamais il ne sera mieux maîtrisé que par moi. N’ayez aucune appréhension, je suis très prudente. Montez et cessez vos manières puériles. Je vous montrerais que vous avez tort. »

Le pauvre Etienne, piégé et déçu se prit à recommencer la folie qui l’avait prit cette même matinée et monta sur l’objet de ses cauchemars.

En vérité, durant toute la journée, il avait tant exagéré les motifs de sa peur que le trajet lui sembla même être agréable. Il y était remonté pour faire plaisir uniquement à sa jeune coéquipière, mais ce fut lui qui en fut le plus satisfait. Que n’aurait-il fait pour pouvoir aussi se faire tutoyer par Aline. Après tout, c’est quand même mieux lorsque l’on doit travailler ensemble, non ? De plus, ce vouvoiement lui rappelait qu’il n’avait pas d’amis à Paris.

Le voyage fut rapide et il eut presque envie de continuer. Il ne voyait pas bien quoi, mais il regretta un petit quelque chose en descendant du deux roues. C’était comme si quelque chose c’était brisé en lui… ou peut être construit ? Ils se séparèrent cependant dans de bonnes conditions, avec un désir commun d’oublier l’altercation qu’ils avaient eue sur un sujet aussi banal et insignifiant que celui ci. Eric se sentait coupable et il aurait voulu faire n’importe quoi pour se racheter. Il voyait bien que cette fille ne le laissait pas indifférent.

Il ne rentra pas tout de suite chez lui, regardant la moto qui s’éloignait. Il eut comme un petit sentiment d’abandon et de tristesse. C’était comme si le soleil ne se relèverait plus et comme si en quelques minutes, il avait vécu toute une vie. C’était sûrement dû à cette fichue moto et les décharges d’adrénaline qu’elle lui avait causé. Il se sentait seul et hébété. Il rentra, se demandant ce qui pouvait bien lui arriver. La fatigue et le poids de ses responsabilités, sans doute. Il n’avait qu’une seule envie, c’était de se poser devant la télé et n’en plus bouger, mais il n’avait pas la télévision.

Aline était partie mais n’avait fait qu’un petit détour. Quelques minutes plus tard, elle était déjà revenue par une route perpendiculaire à celle qu’elle avait empruntée pour partir. Elle eut juste le temps de le voir rentrer dans l’immeuble. Pour qu’il n’en soit que là, elle se dit qu’il avait probablement eu un rendez-vous pendant son absence et se maudit de l’avoir raté. Il devait s’agir d’un cousin, en si peu de temps et dehors. Un traître et rien de plus. Elle le démasquerait aussi, au besoin.

Elle attacha sa moto non loin de là mais hors de portée de vue de l’immeuble et s’installa dans sa petite voiture jaune. Elle brancha tous les systèmes qu’elle avait placé le matin même. Elle ne vit que la porte se refermer. Il avait dû prendre l’escalier. Elle se permit un petit somme. Il lui sembla que seulement quelques secondes avaient eu le temps de passer, lorsque l’alarme de son détecteur de mouvements se mit à sonner. En vérité, la nuit était déjà bien avancée, il était dix heures et demi passées.

Elle vérifia les écrans de surveillance. Elle n’eut que le temps de voir un homme assez grand entrer dans l’appartement. Elle eu soudain peur qu’il s’agisse du deuxième chasseur et qu’il ne soit venu avec l’ordre de l’éliminer… Jamais elle n’avait laissé tuer par quelqu’un d’autre sa cible, et cela n’allait pas arriver maintenant. Elle prit rapidement dans un double fond de sa boite à gants une petite boite métallique noire et sortit. Elle arriva rapidement devant la porte de l’immeuble. Elle plaça la petite boite sur le digicode. Ce soir, il y aurait deux morts ou pas du tout… Tout dépendrait du visiteur. Elle se demanda ce qu’elle préférait. D’un côté, un peu d’action l’enchantait, mais de l’autre, elle s’était promis que ce serait elle qui descendrait la cible.

L’accès au code fut rapide car l’immeuble n’avait pas vraiment un système de défense de pointe, bien au contraire ! Elle s’élança dans le grand bâtiment. Elle gravit les escaliers quatre à quatre, ce n’était pas le moment de rester coincée dans un ascenseur ! Elle arriva enfin devant la porte qu’elle cherchait. Elle pouvait entendre des éclats de voix à l’intérieur, mais qui ne donnait pas de doute sur ce qui se passait : les deux hommes se connaissaient et avait une conversation tout à fait amicale.

-« …les suspects. C’est vrai que le choix est large, mais notre homme ne laisse pas vraiment de traces. Tous ces types ne peuvent être par ailleurs que des intermédiaires.

-J’ai un autre suspect auquel on a pas vraiment pensé. Tu y as en plus bossé dessus… Tu donnes ta langue au chat ?… Holkes ! lança Etienne à ce qui devait être son collègue.

-Pas bête ! C’est vrai que ce pourri habite par ici. Je vais voir ce que je peux faire. Ce mec me doit des mois de boulot pour rien. Fais attention à toi, il est dangereux et très malin…

-Y’a un petit problème avec lui !

-Prison ?

-Non, je te rassure, personne ne l’a eu, cette tâche t’est dévolue. Seulement, il a disparu depuis presque deux ans, sans laisser de trace…

-Envolé ?

-Depuis deux ans apparemment sans laisser de traces. Mais je suis sûr que tu sauras en trouver en menant une petite enquête discrète. »

L’autre sembla réfléchir un instant.

-« De qui tu tiens ça ?

-De ma charmante coéquipière. Cette fille est son enfant adoptive, d’après ce que j’ai cru comprendre. Une fille très bien qui m’a forcé à aller sur sa moto. Elle doit être un ange puisqu’elle fait des miracles…

-J’ai beaucoup étudié le dossier de Holkes, mais à aucun endroit il n’y a été question d’adoption ! T’es sûr de sa fiabilité à cette fille ?

-Elle m’a plutôt l’air assez simple et sympa. Assez perspicace aussi remarque. Elle a mis à bas ma couverture au bout de dix minutes. Si je devais me méfier de quelqu’un, cependant, je ne pense pas que ce serait elle. Si elle avait de mauvaises intentions, je crois qu’elle aurait plutôt fait semblant de ne rien savoir sur moi. En plus, elle tient cette information de son amie…

-Il vaut mieux prévenir que guérir. Je vais demander à la faire muter au plus vite dans un autre commissariat… »

Aline caressa son arme. Elle se dit qu’elle avait bien envie de ne pas attendre la permission de tuer. Deux pour le prix d’un, elle ne pourra probablement pas trouver mieux !

-« Non, c’est aussi bien qu’elle sache d’où je viens. Elle pourra sûrement m’aider plus qu’elle ne l’aurait fait si elle ne l’avait pas su. Je ne lui dirais de toute façon pas tout de ce qui ce passe. Seulement le nécessaire. Ne t’en fais pas pour moi, je suis un grand garçon. Et puis elle est très attachée à son commissariat. Laisse-la. Tu ne peux pas savoir combien il est difficile de changer d’établissement et de ville du jour au lendemain, comme ça. Ca me pèse déjà !

-C’est comme tu veux, mais ta décision me semble dangereuse. Bon, je vais te laisser dormir. »

Aline grimpa rapidement et sans bruit à l’étage au-dessus. Elle entendit au bout d’une petite minute la porte se refermer. Elle ne bougea pas d’où elle était, au cas où Etienne serait resté sur le palier. Elle regarda par une petite fenêtre de l’escalier sur l’entre deux niveaux. Elle vit l’homme qui était venu rendre visite à sa victime. « Ainsi il a travaillé sur mon père… Je saurais qu’il faut se méfier lorsque je le verrais dans la rue », se dit-elle.

L’homme se dirigea vers l’immeuble de la rue d’en face mais ne s’y arrêta pas. Un petit mouvement discret lui fit lever la tête. Une fenêtre portait des rideaux blancs. Les volets n’étaient pas encore fermés et les rideaux bougeaient, comme s’il y avait quelqu’un derrière. La lune se dévoila des nuages un bref instant, mais Aline avait nettement vu un petit éclair. Quelqu’un était en train d’observer quelque chose dans l’immeuble où elle se trouvait avec les lunettes, des jumelles ou un verre grossissant de quelque arme. C’était probablement le deuxième chasseur… Ou un policier qui venait pour elle. Elle était peut être bien suspectée…

Il se faisait à présent vraiment tard, et malgré mon envie de savoir la suite, on s’est quitté. Je l’ai invitée moi-même pour le lendemain dans un endroit que je connaissais bien pour le café. Le patron était un camarade de classe.

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